Les Pyrénées

Des Pyrénées ou des Alpes, dis-moi qui est la plus belle…

 

 

Sur la sublime corniche qui relie le Soulor et l’Aubisque, durant une sortie en vélo, j’avais abordé cette question avec un couple de randonneurs d’expérience.

Et notre conclusion de cette discussion tenue sur la traverse du Soulor fut que les Alpes sont majestueuses mais que les Pyrénées sont d’une échelle plus humaine. Le superbe paysage de l’Iseran est plus difficile à atteindre que le sommet arrondi du Puymorens, dont les sentiers grimpent moins.

Les deux massifs ont des paysages superbes et des parois abruptes, des pics plus hauts que la ligne des arbres et souvent plus hauts que la ligne de la pluie du jour. Les deux hébergent des animaux en alpages, même si les bergers des Pyrénées aimeraient trouver un autre nom pour leurs alpages plutôt que ce mot avec une racine référant aux Alpes. Et leurs fromages se valent bien. Quoique le Beaufort alpin du Beaufortin…

En pratique, quand ca te prend une heure de voiture dans les Alpes pour atteindre le sentier de rando que tu as choisi, en Pyrénées, dans le même délai, ton col est déjà atteint et ta rando débutée.

Je vous parle donc des Alpes dans un autre long article et nous resterons ici en Pyrénées. De plus, mon projet n’est pas de vous faire des descriptions dithyrambiques de paysages mais plutôt de vous raconter comment je les ai traversées. Vous aurez besoin d’une voiture à 55 $ cad par jour plus l’essence. Dans un autre article, je vous explique comment je l’ai fait en vélo, et possiblement en train…

LE MASSIF

Il est formé d’une chaine de montagnes qui relie la Méditerranée à l’est et l’Atlantique à l’ouest. Les plus hautes montagnes sont au centre. L’extrémité orientale s’abaisse assez radicalement vers la mer et crée les côtes du Roussillon à Collioure et celles de la Costa Brava de Catalunya. Les falaises de la Catalogne sont quand même assez abruptes. L’extrémité ouest se termine sur les paysages arrondis du Pays Basque.

Cette chaine de montagnes sert de frontière entre la France et l’Espagne mais, en y regardant de près, la frontière n’est pas rectiligne et les sommets sont souvent dispersés. Et entre certains de ces sommets se cachent des petits pays au sens régional du terme (pays du Sault, Cerdanya…), ou d’anciennes baronnies (Foix) ou des territoires nations intégrés de force à des pays, dont les plus connus sont la Catalogne (partie française et partie espagnole) et le Pays Basque (partie française et partie espagnole).

De ces pays, l’Andorre est le plus curieux exemple: on dit qu’il aurait été oublié lorsque la France et l’Espagne ont négocié la frontière. Mais le problème viendrait plutôt d’une décision de Charlemagne. Pour régler le dilemme, en 1278, on l’a laissé indépendant mais placé sous l’autorité de l’Église et du comte de Foix. Dans les années 1980, l’Andorre était devenue un paradis du duty free, un immense centre-d’achat dans un décor magnifique. Aujourd’hui, le centre-d’achat de la 440 à Laval n’a rien à lui envier en matière de choix et même de prix. Mais derrière les magasins se déploie un vrai paysage de montagnes. La descente en vélo du Pas-de-la-Case à Urgel représente une bonne cinquantaine de km de bonheur descendant. Je l’ai faite plusieurs fois…

Autre particularité générale: comme les Pyrénées ont été grugées jadis par un glacier assez épais venu du nord, le côté français a été sensiblement plus érodé que le côté espagnol. Ce phénomène a causé des dénivelés plus importants au nord avec des paysages plus escarpés. En conséquence, le côté français est plus spectaculaire. Comme il est aussi plus habité et mieux équipé de routes, il devient plus pittoresque, alors que le côté espagnol est demeuré plus sauvage.

Notez aussi que l’on accède aux montagnes par des vallées. Par exemple, de Toulouse vers l’Andorre, la route suit le fond de la vallée de l’Ariège. Cette route n’a pas une forte inclinaison, seul le paysage de chaque côté s’élève radicalement. A Ax-les-Thermes, au fond de la vallée, on est alors entouré de cols et il ne reste qu’à choisir lequel monter.

Conséquence aussi, pour changer de vallée, il faut gravir un ou plusieurs de ces cols, sinon, il faudrait revenir dans la plaine pour prendre une autre vallée. À bien savoir lorsqu’on planifie un itinéraire.

Et ces paysages magnifiques s’atteignent par des routes escarpées mais peu fréquentées. Je ne parlerai pas davantage ici de ces routes de montagne, superbes de paysages et de dangers, si ce n’est que pour faire remarquer que les Français conduisent sur ces routes comme des crosseurs, empiétant allègrement sur la ligne centrale dans les courbes et poussant à l’arrière de la voiture devant. Facile de pousser, c’est la voiture à l’avant qui va absorber le danger du Français qui s’en vient vers vous en rongeant sa courbe ou le poids de cette vache qui cherche son pâturage. Le truc, c’est de laisser passer le Français de derrière et de lui rendre la pareille…

 

L’ITINERAIRE

Je suggère de faire cet itinéraire de l’est vers l’ouest, arrivée à Toulouse, départ depuis Bordeaux, avec des traversées nord-sud de la frontière et, à la fin, des vacances méritées à la mer dans les Landes du golfe de Gascogne.

L’arrivée se fait logiquement à Toulouse. Air Transat y va. Dans cette ville quand même importante, on peut visiter le Capitole, Saint-Trophime, la plus belle collection au monde de têtes d’empereurs romains et se faire un petit feeling du Canal du Midi, incluant ce viaduc en ville qu’en haut, ce ne sont pas des voitures qui l’empruntent mais des péniches…

On peut aussi éviter la ville et s’engager rapidement sur la route vers Ax-les-Thermes. Le site rupesque de la Grotte de Niaux vaut le détour et le donjon de Foix est impressionnant. Ne manquez pas non plus de vous tremper les pieds gratis dans la piscine thermale offerte par Henri IV à son peuple du coin, à Ax-les-Thermes.

Vous aurez compris que la première traversée de la frontière se fera sur l’axe Toulouse, Ax-les-Thermes, Puymorens, Pas-de-la-Case, Andorre, Urgel.

 

 

Vous pourriez aussi débuter à Marseille et Air Transat y va. Mais c’est un autre voyage car cette arrivée implique d’éviter Marseille mais de faire Cassis, Aix-en-Provence, Avignon, Arles, les Saintes-Maries-de-la-Mer pour les plus belles plages et Nîmes pour l’arène romaine. Mais il faut savoir renoncer à tout ça sinon vous allez gâcher votre voyage en montagne.

De Toulouse, si vous tenez vraiment à voir la Méditerranée, faudrait faire le détour par Carcassonne, vers la mer à Agde ou à Leucate-plage, mes spots préférés. Choisissez bien vos arrêts car la région est assez bétonnée. Le mont Canigou vaut le détour. Vous pourriez alors quitter la mer dans l’axe Collioure, Prades, Mont-Louis, Font-Romeu, Bourg-Madame, Puymorens, Pas-de-la-Case, Andorre. Mais votre voyage en montagne serait mal parti car vous auriez déjà consommé une semaine… Mais vous auriez essayé le Train Jaune qui mène à Mont-Louis.

Vous pourriez aussi passer une semaine à Barcelone et visiter la Costa Brava avec le train de banlieue de la côte. Vous auriez ainsi économisé une semaine de location de voiture. Mais Barcelone et la montagne, ce sont deux mondes.

 

SAINT-LARY

Une fois introduit en montagne, en sortant de l’Andorre par la Seu-d’Urgel, il vous faudra prendre une route espagnole pour vous rendre dans la région du Mont Perdido et à Saint-Lary-Soulan, région qui constituera le clou de votre séjour en montagne. On rejoint Saint-Lary, en France, par El Pont-de-Suert, Ainsa, Bielsa et le court tunnel de 3 km d’Aragnouet-Bielsa. Vous aurez constaté en passant que le côté espagnol des Pyrénées est moins développé.

Saint-Lary-Soulan est l’exemple du développement harmonieux assez réussi d’un village de vacances en montagne, ski l’hiver et paysages l’été, avec tous les services. Et la région environnante a su conserver son authenticité. Tout est là pour l’atmosphère et la rando, et on peut se rendre à Arreau, la ville voisine, avec son centre historique et son marché de qualité. Et il y a des cols!!! Et la réserve de Néouvielle!!!

Prévoyez rester là plusieurs jours. J’y ai moi-même passé deux fois un mois.

 

GAVARNIE ET LOURDES

On ne quitte pas Saint-Lary et la vallée de l’Aure par l’autoroute en bas mais plutôt par les cols de l’Aspin et surtout par le Tourmalet, col mythique du Tour de France. Ce trajet vous conduira à votre prochaine étape, la vallée du Gave de Pau, moins développée mais toute aussi spectaculaire: Luz-Saint-Sauveur, Gavarnie, Troumouse, Luz-Ardiden…

Vous devrez impérativement faire la randonnée facile du plancher du Cirque de Gavarnie, vous rendre même sous la chute qui est tellement haute que l’eau se disperse au vent avant de toucher terre. Prévoyez bien votre horaire de la journée à cause du trajet et aussi de l’approche à pied du cirque dans le parc. Rando facile et fréquentée.

Si vous avez déjà été servant de messe ou avez travaillé de quelque manière pour les soeurs ou les curés, vous devez absolument visiter Lourdes. On peut y trouver du logement correct mais réservez lors d’une fête religieuse. Arrivez en après-midi pour arpenter la rue des Souvenirs et autres scapulaires qui mène au site (et au cirque). La vision est spectaculaire pour les connaisseurs, stupéfiante pour les autres. Découvrez le faste de la cathédrale, l’arnaque de la Grotte des apparitions, la parade des soutanes, l’orgie des distributeurs automatiques de chandelles, le gaspillage d’eau miraculeuse qui gicle par d’innombrables robinets pour se perdre dans le caniveau. Vous serez ému aux larmes, incrédule, bien triste devant l’hystérie de ces vieilles dames vêtues de noir, souvent italiennes ou espagnoles.

Et surtout, revenez le soir pour la parade aux flambeaux. Spectaculaire!!! Surtout si vous retenez les services (payants) d’une Fille de Lourdes, car il y a à Lourdes de ces filles assez jolies qui offrent leurs services moyennant rémunération. Elles portent des vêtements explicites et travaillent le soir sur les trottoirs pour offrir leurs services à de vieux Messieurs. Tu mimes un lumbago extrême et tu engages une de ces filles aide-malades. Ca va te donner une place à l’avant de la Procession aux flambeaux en superbe chaise à roulettes antique. Pour un léger supplément, tu peux le faire en civière…

Les cierges valent un Euro pièce.

 

Après la parade, vous pourrez agréablement souper en ville…

 

LE SOULOR ET L’AUBISQUE

Votre prochaine étape ne sera pas une vallée mais des cols. Plus précisément une corniche entre deux cols, le Soulor et l’Aubisque. Vous devriez absolument marcher cette corniche constituée par une route taillée dans la falaise. Foglia l’avait traitée de lunaire. Mais il n’était pas croyant. Moi qui partais de Lourdes ai plutôt pensé à l’antichambre du Paradis : d’abord la veille, tu t’es payé une Dernière Cène mais pas trop de vin; le lendemain am, si tu es en vélo, ça débute par un long purgatoire de faux-plats pour faire l’approche du col du Soulor. En voiture, c’est un raccourci pour le Paradis, payé avec des indulgences. Au pied de la vraie Croix à monter, à Arrrens-Marsous, tu t’offres une communion sous forme de salade de gésiers.

Puis débute le Calvaire, le vrai, 550 m. sur 8 km. Et en haut, la porte du Paradis : un vieille sert de Saint-Pierre et garde l’entrée. Elle opère une biquoque où elle fait goûter (et vend) son fromage. À côté, deux astides chevaux de pâturage bloquent la route, tels des Cerbères. Ils se tasseront si tu leur donnes une carotte (que la vieille vend…).

Et le PARADIS, cette route sans dénivelée, en corniche accrochée à la falaise, du Soulor à l’Aubisque, 10 km en plat avec vues totales. Un aller-retour sur la corniche vous ramènera à votre voiture. Attention à l’horaire: jadis du moins, la route était à sens unique, un sens le matin (pour les Catho), l’autre l’après-midi (pour les Mécréants). Vous quitterez l’Aubisque vers Eaux-Chaudes, Eaux Bonnes et Laruns.

LARUNS, LE COL DU POURTALET VERS RONCEVAUX

Si vous manquez de temps, vous pourriez de Laruns rejoindre les Landes et Bordeaux par autoroute. A date, vous avez vu le plus spectaculaire des Pyrénées. Mais si vous continuez le périple, il vous restera la rencontre avec l’Histoire et avec la douceur des collines du Pays Basque.

Cette prochaine étape exigera quelques heures de conduite côté espagnol. L’idée est de franchir le col du Portalet. Vous traverserez ensuite Formigal, un centre de ski que je ne connais pas; et Sallent, un village inondé par un barrage et dont seul le clocher émerge au milieu du lac. C’est sur une de ces routes que j’avais descendu en vélo la veille où un joli camping sur le bord d’un joli ruisseau a été lavé en pleine nuit. Un mur de boue et d’eau est descendu du sommet suite à un violent orage qu’on n’avait jamais soupçonné en bas: quinze morts…

En bas du col, prenez la route très correcte pour vous rendre à Jaca, sigues, Noain et monter vers Roncevaux. Vous pourriez vous rendre à Pampelune, célèbre pour ses courses de toros et son centre historique austère mais agréable. Cependant vous devriez garder votre temps pour San Sebastian, sur la mer, plus animée.

Roncevaux (Roncevalles en vieil espagnol), c’est Charlemagne et la bataille contre les Vascons, moins barbares que les Francs, en l’an 778. Vous ne pouvez pas traverser cette région sans avoir lu « La Chanson de Roland », la premier roman écrit en français. J’avais étudié cette œuvre au secondaire mais je l’ai réellement lue dans la bibliothèque municipale de Saint-Jean-Pied-de-Port, une bâtisse en pierres datant de 1650 sur la rive du torrent qui descend du col. L’Épée magique, les chevaliers, le Saint-Graal, tout est là, Walt Disney n’a rien inventé

 

(Photo Wikipedia)

Notez que je n’ai pas de photos à présenter, ce tour des Pyrénées en vélo se passa quand les ordis se nommaient Commodore 64 et que les photos se présentaient en diapos de plastique et cellulose…

Roncevalles c’est aussi une étape du Camino de Compostelle, pour beaucoup la première nuit du périple. Voici ce qu’en disait ma sœur qui a fait tout le Pèlerinage :

« Pour entreprendre le Camino, je m’étais rendue en train à Saint-Jean-Pied-de-Port. De là, il faut franchir les Pyrénées, ce qui se fait par le sentier historique qui grimpe le col vers Roncevaux. Après un certain temps pas si long, j’ai commencé à voir des pièces de vêtements par terre, puis des articles d’équipement de rando. Quelqu’un se promène son sac ouvert, me dis-je. J’avais pensé les ramasser pour les remettre au propriétaire en haut mais il y en avait trop.

Plus loin, j’ai rencontré ça et là des filles assises et pleurant…

Imaginez, ce n’était que leur première étape et elles avaient déjà abandonné du stock sur la route…».

LES LANDES

Il ne vous reste qu’une petite semaine de voyage, que vous tenterez de passer en vacances. Après Saint-Jean-Pied-de-Port, rendus à la mer, vous pourriez partir à gauche vers :

– Biarritz: station balnéaire démodée mais avec une certaine histoire. Louis XlV s’est marié pas loin. On y trouve aussi une célèbre vague à surf. Si vous logez là, visez le centre historique. C’est là que j’ai établi mon record touristique: ma seule chambre en carrière dans un hôtel avec zéro étoile, oui, ZERO, avec une plaque officielle fièrement affichée. C’est peut-être devenu l’hôtel La Marine. J’ai connu de pires chambres mais jamais moins que zéro zétoiles. C’était quand même très correct.

C’est là que j’avais accueilli ma fille venue me rejoindre avec son vélo:

– Guéthary : oui, George Guéthary se nomme ainsi parce que Luiz Mariano n’est pas plus italien que toi pis moi. A moins que ce ne soit la Poune?????

– San Sebastian: au Pays Basque espagnol. Dans le centre historique, la tournée des bars à tapas vous sera mémorable

– Ainhoa : dans l’arrière-pays, pour une idée de la campagne basque et Espelette qui cultive le piment si apprécié des bourgeois…

Vous pourriez aussi rejoindre San Sebastian depuis Pampelune, après Roncevaux

Mais tout compte fait, renoncez à tout ça: c’est le début d’un autre voyage, qui ferait le Pays Basque, Oviedo, Compostelle, Porto et se terminerait à Lisbonne ou sur la côte sud portugaise à Faro.

Tournez plutôt à droite vers le nord et les Landes: du sable sorti de la mer que le vent a charrié sur cent cinquante km de distance. LA PLAGE!!!    Napoléon y a fait planter des pins pour fixer ce sable. D’Hossegor au bassin d’Arcachon.

Trouvez-vous un hébergement (et un certain budget) pour aborder un de ces petits villages récents et balnéaires. Les plages sont incommensurables et le naturisme répandu. J’aimais bien Vieux-Boucau.

(Photos Wikipedia)

 

Et n’oubliez pas de vous garder une nuit pour l’aéroport de Bordeaux, histoire de ne pas rater l’avion. Ce pourrait être à Arcachon ou, si vous êtes prudent, à côté de l’aéroport

 

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